Le 3 mars 1991. George Holliday, un caméraman amateur, filme le passage à tabac de Rodney King, arrêté pour conduite en état d’ébriété par quatre officiers blancs. Cette vidéo de dix minutes, dans laquelle le chauffeur de taxi reçoit 56 coups de matraque, braque les projecteurs sur les brutalités policières dont sont victimes les Noirs américains. L’annonce de l’acquittement des policiers provoque une colère générale. Le jury, majoritairement blanc, est soupçonné d’avoir offert un laisser-passer aux accusés. Pendant plusieurs jours, la ville frémit sous les actes de violence et les multiples incendies, donnant à l’ensemble des airs de guerre civile. Profitant du chaos ambiant, les pilleurs prennent d’assaut les magasins tandis que les forces de l’ordre désertent le terrain.
Après l’acquittement des quatre policiers, alimenté par des années d’inégalité raciale et économique dans la ville, la haine et la fureur se sont répandues dans les rues, entraînant cinq jours d’émeutes à Los Angeles. Cette histoire a débuté un an plus tôt, dans la nuit du 3 mars 1991 sur l’autoroute Foothill, à travers le quartier de Lake View Terrace à Los Angeles. Rodney King, qui était en liberté conditionnelle pour vol, avait mené la police à une poursuite à grande vitesse à travers les rues de Los Angeles. Lorsque la police l’a arrêté, King a été amené hors de sa voiture. Les officiers l’ont ensuite frappé à plusieurs reprises et l’ont battu avec des matraques pendant 15 minutes. La vidéo montre une douzaine de policiers qui se tenaient debout, regardaient et commentaient les coups de matraques de leurs collègues. Rodney King fut victime d’une jambe cassée, 9 fractures du crâne, une atteinte du nerf facial qui laissait des parties de son visage paralysées à vie. Des contusions multiples et des os cassés sur tout son corps. Cette affaire divisa l’Amerique.
Un an plus tard, le 29 avril 1992, un jury composé de dix blancs, un latin et un asiatique, pour aggraver les choses, le jury mis en place n’a pas inclus un seul afro-américain, a déclaré les quatre officiers non coupables. Les acquittements ont été annoncés vers 15 heures. Moins de trois heures plus tard, les manifestations ont commencé. Les résidents ont incendié, pillé et détruit des magasins d’alcools, des épiceries, des magasins de détail et des fast-food. Certains commerçants américano-coréens s’organisent en milices et ont recours à des armes à feu pour se défendre. Les automobilistes blancs et latins ont été ciblés, certains ont été retirés de leurs voitures et battus. Les afro-américains ont déclaré qu’ils ne se sentaient pas protégés en cas de besoin, mais ont plutôt déclaré être harcelés sans raison valable. Le 1er Mai, troisième jour des émeutes, Rodney King lui-même a tenté d’appeler publiquement les habitants de Los Angeles à cesser de se battre. Il s’est éxprimé d’un palais de justice de Beverly Hills avec son avocat : “Est-ce qu’on ne pourrait pas essayer de tous s’entendre ?”
Au cours des cinq jours d’agitation, plus de 50 décès liés à l’émeute, dont 10 personnes qui ont été tuées par des officiers du LAPD (Los Angeles Police Departement) et des gardes nationaux. Plus de 2 000 personnes ont été blessées et près de 6 000 pilleurs et pyromanes présumés ont été arrêtés. Parmi ceux qui ont été arrêtés pendant les émeutes, 36% étaient des afro-américains et 51% étaient des latinos-américains, selon Rand Corp. Les émeutes ont également perturbé la vie quotidienne des habitants de Los Angeles. Un couvre-feu a été mis en place, du coucher au lever du soleil, la livraison du courrier s’est arrêtée et la plupart des résidents ne pouvaient pas se rendre au travail et à l’école. Plus de 1 000 bâtiments et environ 2 000 entreprises coréennes ont été endommagés ou détruits.
Au total, les dégats sont estimés à environ un milliard de dollards. Le couvre-feu de la ville a finalement été levé le matin du 4 Mai. Lentement, les résidents sont revenus à leur routine quotidienne. Mais la vidéo du passage à tabac de Rodney King et les émeutes de Los Angeles ont engendré des problèmes sociaux qui n’ont toujours pas été résolus. Cette vidéo choquante de son passage à tabac par les forces de l’ordre serait la première d’une longue série de vidéos de brutalité policière à devenir virale. Ce sont les problèmes tels que le délit de faciès qui sont évidents aujourd’hui. Les événements de Los Angeles sont les émeutes raciales les plus meurtrières qu’ait connu l’Amérique. Un traumatisme profond qui n’empêchera pas dans les années suivantes les violences policières de perdurer jusqu’à aujourd’hui, qu’elle soit physique ou verbale.
En 1993, les quatres policiers sont rappelés devant la justice pour répondre de leurs actes. Stacey Koon et Laurence Powell ont été reconnus coupables de violation des droits civils de Rodney King. Ils ont tous deux purgé 30 mois de prison et n’ont pu exercer de nouveau leur fonction de policier. Ils commencent à purger leur peine en Octobre 1993 et sont remis en liberté en Décembre 1995. Les deux autres officiers, Timothy Wind et Theodore Briseno, ont tous deux été acquittés puis congédiés par le LAPD. Koon ne parle pas de sa vie personnelle en raison de menaces de mort. Powell a, par la suite, travaillé dans l’industrie de la vente au détail d’ordinateurs. Malgré son passé, Wind a été embauché comme agent de service communautaire pour le département de police de Culver City en 1994 et occupa le poste jusqu’en 2000. Il s’est ensuite inscrit à l’école de droit de l’Université d’Indiana et a obtenu son diplôme en 2003. Tandis que Theodore Briseno était le seul officier à avoir témoigné contre les autres, il a été renvoyé du LAPD en 1994. Après 14 ans de service, le chef de la police de Los Angeles, Daryl Gates a été contraint de démissionner en juin 1992. Il meurt en 2010.
Concernant Rodney King, la ville de Los Angeles a était condamnée à lui verser 3,8 millions de dollars. Il a acheté une maison pour sa mère dans la banlieue de Rialto de Los Angeles. Il s’était engagé à se marier quand il est découvert inconscient au fond de sa piscine en Juin 2012. Son autopsie a rapporté que les drogues et l’alcool étaient dans son corps lors de son décès. Il avait 47 ans.
